Publié le : 01/08/2025
Petit coup d’émotion en sortant d’audience. Boule de confiance et d’espoirs qui viennent me mouiller les yeux …
J’accompagnais un client qui se battait pour la garde de son fils de 3 ans.
A la base, avec ce client, c’était très mal barré : lors du premier rendez-vous, à l’issue d’une heure d’entretien, je décline la prise en charge de sa situation. Je ne le sens pas. Il sort d’une garde à vue pour des violences conjugales (qu’il conteste) sans être capable de s’interroger ou de se remettre en question. Son agressivité à l’égard de la mère de son fils, qu’elle soit légitime ou non, me fatigue d’avance… je ne me sens ni capable de le représenter, ni capable de l’amener « là où tout pourrait aller mieux ». D’ailleurs, lors de ce premier échange, je crois que même lui à bien du mal avec moi… ba oui : « déjà qu’un avocat c’est trop cher, alors si en plus elle ne dit pas ce qu’on a envie d’entendre… à quoi ca sert ? ». Bref, à l’issue de cette rencontre, on se quitte sans aucun regret !
Et puis à l’approche de l’audience, il revient… il m’explique que mes propos « ça lui trotte dans la tête ». Je ne me fais pas trop d’illusions, ce n’est
pas mes « bonnes paroles » qui l’ont remué… En réalité, il revient me voir car il flippe de cette audience, il flippe de perdre son fils, il flippe de cette vie qui part en claquette. Et enfin, pendant cette seconde consultation, il m’écoute pour de vrai. Grâce à cette peur qui le met au pieds du mur, grâce à cette confiance qu’il m’offre comme dernière bouée de sauvetage, il entend ce que je lui propose de percevoir :
- la peur légitime de cette ex-conjointe et donc l’impossibilité de faire avancer la relation parentale
- l’intérêt d’apporter de la sécurité à cette relation père/mère
- la difficulté pour la maman de faire confiance à ce
Bref, il écoute. Je ne prends son dossier qu’à la condition qu’il applique les règles que je l’invite à suivre pour les semaines à venir :
- n’envoyer plus que des messages autour de l’enfant
- s’abstenir de tout reproche
- accepter les reproches possibles sans s’en défendre… juste en attendant le bon moment pour en reparler et re-contextualiser
- Ne pas dire non à tout ce qui vient de la mère
- Présumer que cette mère ne lui veut pas de mal mais qu’elle est juste remplie de peurs démesurées
Et pour une fois, ce client il m’écoute vraiment, sincèrement, en comprenant que mes conseils sont là juste pour améliorer cette situation. Il se débrouille même tellement bien… j’en suis épatée en le revoyant !
Le jour de l’audience, avec l’avocate de Madame, nous arrivons avec des dossiers de 10 cm d’épaisseur. Armées jusqu’aux dents pour se battre la garde d’un petit de 3 ans alors que le domicile de chacun des parents est éloigné d’environ 1h de route ! Audience de souffrances en perscpective…
Juste avant notre passage devant la Juge, ma consoeur me confie l’étonnement de sa cliente sur cette coparentalité devenue simple et évidente… Ni l’une ni l’autre n’avons envie de gâcher ce qui a été semé par une audience qui ravivera la colère : « alors, on se tente un accord transactionnel ? Ouiiiiii on essaye !!! »
Et ca a fonctionné ! Ce couple parental est ressorti avec un accord… A terme, ce petit garçon sera en garde alternée.
Je suis gonflée de fierté en regardant le chemin de cet homme qui, dans ces moments si durs, a découvert pleinement ses ressources et son ouverture. Je suis fière d’être son avocate.
Et j’avoue, mes yeux se sont humidifiés quand j’ai entendu Madame dire à Monsieur : « et pour l’anniversaire du petit, c’est mon jour… mais tu veux le voir un coup ? ». Ce client revenait de tellement loin, cette famille m’apparaissait tellement foutue. Mais j’avais baissé les bras trop vite… et il me l’a prouvé !